https://www.dropbox.com/s/uvxhywwz7621okk/Philozarts%20270915.mp4?dl=0
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Une très jolie séance accompagnée des collages de Sylvia Guérin Harvois et des photographies de Janine Mignot… qui semblent parler le même langage !
LA mémoire… ne peut-on penser différents types de mémoire ? Nous avons évoqué la diversité des rapports entre la mémoire et… récit, temps, histoire, politique, imagination, conscience, préconscient, inconscient, passion, souvenir… oubli !
En effet, la mémoire peut-elle se réduire à une réserve de traces laissées par l’expérience qu’il nous faudrait à chaque fois faire revenir à la conscience, autrement dit, ne serait-elle qu’accumulation de souvenirs ?
« […] on pourrait se représenter deux mémoires théoriquement indépendantes. La première enregistrerait, sous forme d’images-souvenirs, tous les événements de notre vie quotidienne à mesure qu’ils se déroulent ; elle ne négligerait aucun détail ; elle laisserait à chaque fait, à chaque geste, sa place et sa date. Sans arrière-pensée d’utilité ou d’application pratique, elle emmagasinerait le passé par le seul effet d’une nécessité naturelle. Par elle deviendrait possible la reconnaissance intelligente, ou plutôt intellectuelle, d’une perception déjà éprouvée ; en elle nous nous réfugierions toutes les fois que nous remontons, pour y chercher une certaine image, la pente de notre vie passée. » Bergson, Matière et mémoire
Ne pourrait-on pas penser une mémoire constitutive du temps ? N’est-elle pas la faculté qui nous permet en effet de relier entre eux les instants qui se succèdent pour maintenir une continuité entre eux, et donc élaborer le temps ?
« Car un nombre constitué par des intervalles de temps, si la mémoire ne vient pas à notre aide, ne peut absolument pas être jugé par nous. Si brève que soit une syllabe, du moment qu’elle commence et finit, elle a son début en un temps et sa fin en un autre. Elle est donc elle-même entendue en un laps de temps, si petit soit-il, et elle se tend de son début vers son milieu, vers son terme… Aussi, même pour entendre la plus brève syllabe, nous faut-il l’aide de la mémoire, pour qu’en cet instant ou résonne non plus le début, mais la fin de la syllabe le mouvement produit par le début perdure dans l’âme. Sinon, nous pouvons dire que nous n’avons rien entendu. » Saint Augustin, La musique, VI
Mais encore, la mémoire ne serait-elle pas ce qui nous permet de nous reconnaître nous-même tout à travers le temps justement ? Pouvoir se souvenir de notre passé c’est toujours se rapporter à soi. Que nous arrive-t-il quand nous perdons la mémoire ? L’angoisse qui en résulte n’est-elle pas celle de la perte du moi ?
« Car puisque la conscience accompagne toujours la pensée, et que c’est là ce qui fait que chacun est ce qu’il nomme soi-même, et par où il se distingue de toute autre chose pensante : c’est aussi en cela seul que consiste l’identité personnelle, ou ce qui fait qu’un être raisonnable est toujours le même. Et aussi loin que cette con-science (on pourrait dire notre mémoire) peut s’étendre sur les actions ou les pensées déjà passées, aussi loin s’étend l’identité de cette personne : le soi est présentement le même qu’il était alors ; et cette action passée a été faite par le même soi que celui qui se la remet à présent dans l’esprit. » Locke, Essai sur l’entendement humain
Si donc la mémoire a d’abord été pensée comme une des grandes facultés de l’âme – Saint Augustin parlait de « la trinité intérieure : mémoire, volonté et intelligence », la mémoire a aussi eu pour fonction d’assurer le maintien de la chaîne de transmission (la mnémotechnie remonte au 4ème siècle avant J-C.). Elle s’est traduite aussi, sur un plan politique et historique, au 20 siècle par l’idée d’un « devoir de mémoire », devoir moral d’un Etat contre l’oubli collectif (mais y a-t-il une mémoire collective ?) des victimes involontaires.
Dans un tout autre registre, nous avons fait un bout de route avec Nietzsche qui, avant Freud, pense l’oubli comme une faculté, une vertu bénéfique, protecteur et gardien de la vie… de l’ordre psychique. Il faut savoir fermer les portes et les fenêtres de la conscience pour faire un peu de place au nouveau ! S’il est impossible de vivre sans mémoire, il serait bien difficile de vivre sans oubli. Freud affirme que l’on guérit en se souvenant (faire revenir à la conscience ce qui se niche dans l’inconscient et qui m’empêche de vivre bien) mais que trop de mémoire rend aussi malade. Le préconscient, cette zone de souvenirs qui restent à notre disposition si nous faisons l’effort de les convoquer à la conscience, est aussi une zone de retenue des préoccupations qui nous perturbent.
Et nous nous sommes attardés sur un passage de Nietzsche, plein de poésie, établissant le lien entre mémoire, oubli et bonheur :
« Dans le plus petit comme dans le plus grand bonheur, il y a quelque chose qui fait que le bonheur est un bonheur : la possibilité d’oublier, ou pour le dire en termes plus savants, la faculté de sentir les choses, aussi longtemps que dure le bonheur, en dehors de toutes perspective historique. L’homme qui est incapable de s’asseoir au seuil de l’instant en oubliant tous les événements du passé, celui qui ne peut pas, sans vertige et sans peur, se dresser un instant tout debout, comme une victoire, ne saura jamais ce qu’est un bonheur et, ce qui est pire, il ne fera jamais rien pour donner du bonheur aux autres. Imaginez l’exemple extrême : un homme qui serait incapable de ne rien oublier et qui serait condamné à ne voir partout qu’un devenir; celui-là ne croirait pas à sa propre existence, il ne croirait plus en soi, il verrait tout se dissoudre en un infinité de points mouvants et finirait par se perdre dans ce torrent du devenir. Finalement, en vrai disciple d’Héraclite, il n’oserait même plus bouger un doigt. Toute action exige l’oubli, comme la vie des êtres organiques exige non seulement la lumière mais aussi l’obscurité. Un homme qui ne voudrait sentir les choses qu’historiquement serait pareil à celui qu’on forcerait à s’abstenir de sommeil ou à l’animal qui ne devrait vivre que de ruminer et de ruminer sans fin. Donc, il est possible de vivre presque sans souvenir et de vivre heureux, comme le démontre l’animal, mais il est encore impossible de vivre sans oubli. Ou plus simplement encore, il y a un degré d’insomnie, de rumination, de sens historique qui nuit au vivant et qui finit par le détruire, qu’il s’agisse d’un homme, d’un peuple ou d’une civilisation. » Nietzsche, Considérations inactuelles.
Et finalement…. on discute ! (à gauche Sylvia Guérin Harvois)
Toutes les photographies de cet apéro philo ont été prises par Janine Mignot que nous remercions.
S’il est un penseur pessimiste, c’est bien Schopenhauer ! Alors pourquoi visiter le bonheur en sa compagnie ? Parce que justement, il est pessimiste et s’il envisage 50 règles pour être heureux c’est bien que, malgré tout, il le cherche lui aussi. Outre ses œuvres philosophiques dont la plus importante est Le monde comme volonté et comme représentation, il avait un penchant pour les petits manuels de philosophie pratique, c’est-à-dire liés à la vie et à l’action.
C’est un de ces petits manuels qui nous intéresse (conçu entre 1830 et 1840), puisqu’il porte sur la question de savoir comment être heureux à travers 50 règles, se réclamant de l’épicurisme.
Ce qui nous a donné l’occasion de revisiter sur un mode dialogique la Lettre à Ménécée ! Mais aussi de faire un clin d’œil à Rousseau pour terminer sur une note plus… poétique !
» Mais s’il est un état où l’âme trouve une assiette assez solide pour s’y reposer tout entière et rassembler là tout son être, sans avoir besoin de rappeler le passé ni d’enjamber sur l’avenir ; où le temps ne soit rien pour elle, où le présent dure toujours sans néanmoins marquer sa durée et sans aucune trace de succession, sans aucun autre sentiment de privation ni de jouissance, de plaisir ni de peine, de désir ni de crainte que celui seul de notre existence, et que ce sentiment seul puisse la remplir tout entière ; tant que cet état dure celui qui s’y trouve peut s’appeler heureux, non d’un bonheur imparfait, pauvre et relatif, tel que celui qu’on trouve dans les plaisirs de la vie mais d’un bonheur suffisant, parfait et plein, qui ne laisse dans l’âme aucun vide qu’elle sente le besoin de remplir. » Jean-Jacques Rousseau, Les rêveries du promeneur solitaire.
Sous un barnum à la découverte d’une sculpture de Muriel Duret
Avec Muriel Duret
La connaissance vise la recherche du vrai, la morale tend vers le bien, et le beau serait la finalité de l’art et le critère qui nous permettrait de juger de la valeur d’une œuvre d’art. Pourtant, certaines productions artistiques semblent bien se détourner de cette finalité première… d’ailleurs était-elle première ?
A la rentrée…. les dates et nouveaux projets en 2016 !
Les thèmes proposés sont toujours susceptibles d’être modifiés en fonction des attentes ou demandes des participants et des artistes !
Si on peut admettre que c’est dans l’art que la vérité d’une époque se manifeste, si on accepte l’idée que les nouvelles technologies et les progrès fulgurants qu’elles connaissent nous déterminent d’une certaine manière, n’est-il pas dans l’ordre des choses que les artistes s’en saisissent ?
Tout commence avec la main… Aristote n’en disconviendra pas ! C’est elle qui rend possible la fabrication d’outils la complétant ou la renforçant.
« Ce n’est pas parce qu’il a des mains que l’homme est le plus intelligent des êtres, mais parce qu’il est le plus intelligent des êtres qu’il a des mains. En effet, l’être le plus intelligent est celui qui est capable de bien utiliser le plus grand nombre d’outils : or, la main semble bien être non pas un outil, mais plusieurs. Car elle est pour ainsi dire un outil qui tient lieu des autres. C’est donc à l’être capable d’acquérir le plus grand nombre de techniques que la nature a donné de loin l’outil le plus utile, la main. Aussi ceux qui disent que l’homme n’est pas bien constitué et qu’il est le moins bien partagé des animaux (parce que dit-on, il est sans chaussures, il est nu et n’a pas d’armes pour combattre) sont dans l’erreur. Car les autres animaux n’ont chacun qu’un seul moyen de défense et il ne leur est pas possible de le changer pour un autre, mais ils sont forcés, pour ainsi dire, de garder leurs chaussures pour dormir et pour faire n’importe quoi d’autre, et ne doivent jamais déposer l’armure qu’ils ont autour de leur corps ni changer l’arme qu’ils ont reçue en partage. L’homme au contraire, possède de nombreux moyens de défense, et il lui est toujours loisible d’en changer et même d’avoir l’arme qu’il veut quand il veut. Car la main devient griffe, serre, corne ou lance ou épée ou toute autre arme ou outil. Elle peut être tout cela, parce qu’elle est capable de tout saisir et de tout tenir. » Aristote, Les parties des animaux
Et la technique se développe et l’homme se rend « maître et possesseur de la nature » comme le suggérait Descartes. L’homme façonne le monde à son image et par là se transforme lui-même… mais toutes ses activités ne visent pas l’utile. Quelque chose en lui, une sensibilité sans être sensiblerie, le pousse à être attentif à la beauté du monde et à tenter de la produire !
« Remarquons que l’artiste a toujours passé pour un « idéaliste ». On entend par là qu’il est moins préoccupé que nous du côté positif et matériel de la vie. C’est, au sens propre du mot, un « distrait ». Pourquoi, étant plus détaché de la réalité, arrive-t-il à y voir plus de choses ? On ne le comprendrait pas, si la vision que nous avons ordinairement des objets extérieurs et de nous-mêmes n’était une vision que notre attachement à la réalité, notre besoin de vivre et d’agir, nous a amenés à rétrécir et à vider. De fait, il serait aisé de montrer que plus nous sommes préoccupés de vivre, moins nous sommes enclins à contempler, et que les nécessités de l’action tendent à limiter le champ de la vision. (…) Mais, de loin en loin, par un accident heureux, des hommes surgissent dont les sens ou la conscience sont moins adhérents à la vie. La nature a oublié d’attacher leur faculté de percevoir à leur faculté d’agir. Quand ils regardent une chose, ils la voient pour elle, et non plus pour eux. Ils ne perçoivent plus simplement en vue d’agir ; ils perçoivent pour percevoir, – pour rien, pour le plaisir. Par un certain côté d’eux-mêmes, soit par leur conscience, soit par un de leurs sens, ils naissent détachés ; et selon que ce détachement est celui de tel ou tel sens, ou de la conscience, ils sont peintres, sculpteurs, musiciens ou poètes. C’est donc bien une vision plus directe de la réalité que nous trouvons dans les différents arts ; et c’est parce que l’artiste songe moins à utiliser sa perception qu’il perçoit un plus grand nombre de choses. » Bergson, La pensée et le mouvant
L’art est inutile et pourtant il est liberté et pensée. Il serait même ce qui révèle la « vérité d’une époque » !
« En prétendant que l’imitation (de la nature) constitue le but de l’art, que l’art consiste par conséquent dans une fidèle imitation de ce qui existe déjà, on met en somme le souvenir à la base de la production artistique. C’est priver l’art de la liberté, de son pouvoir d’exprimer le beau. L’homme peut certes avoir intérêt à produire des apparences comme la nature produit ses formes. Mais il ne peut s’agir que d’un intérêt purement subjectif, l’homme voulant montrer son adresse et son habilité, sans se soucier de la valeur objective de ce qu’il a l’intention de produire. Or, un produit tire sa valeur de son contenu, dans la mesure où celui-ci participe de l’esprit. Tant qu’il imite, l’homme ne dépasse pas les limites du naturel, alors que le contenu doit être de nature spirituelle […]. Si l’on veut assigner à l’art un but final, ce ne peut être que celui de révéler la vérité, de présenter d’une façon concrète et figurée ce qui s’agit dans l’âme humaine. » Hegel, Esthétique
Quand l’art est devenu critique, cynique et forme de résistance au début du siècle dernier, il s’est emparé des objets techniques pour en faire des œuvres, et aujourd’hui il s’empare des techniques comme mode d’expression.
Pourquoi l’impression 3D aurait-elle échappé à la règle ? Les artistes s’en saisissent aussi ! La question qui semble à nouveau frais se poser : est-ce encore de l’art ?… Dario Santacroce, artiste plasticien, sculpteur, ne se la pose pas quant à lui. L’impression 3D est un mode d’expression comme un autre. Le problème n’est pas là ! Il recherche la forme parfaite… la perfection dans la forme… La 3D permet d’approcher davantage de cette perfection !
Objection du public : « Mais la perfection n’est pas humaine ! »
Aristote (384-322 avant J.-C.), philosophe grec, disciple de Platon à l’Académie, il est l’un des penseurs les plus influents que le monde ait connu. Chez Aristote, la philosophie est comprise dans un sens plus large qu’aujourd’hui. Elle est à la fois recherche du savoir pour lui-même, contemplation et science des sciences.
Hegel, né le 27 août 1771 à Stuttgart il meurt le 14 novembre 1831 à Berlin. Philosophe allemand, il enseigne la philosophie sous la forme d’un système de tous les savoirs.
Henri Bergson, né le 18 octobre 1859 à Paris où il meurt le 4 janvier 1941. Philosophe français, prix Nobel de littérature en 1927, son œuvre, entrée dans le domaine public le 1er janvier 2012, est étudiée dans différentes disciplines : cinéma, littérature, philosophie, neuro-psychologie… il était déjà trans disciplinaire !
Les photographies sont de Janine Mignot – Remerciement à Sophie Lamit pour son accueil dans l’espace atelier de l’Escapade à Larchant.
La proposition était de faire la distinction entre amour et amitié… ce qui fonde leur différence puisque différence il y a en effet.
Trois points ont été retenus :
L’amitié n’est pas exclusive à l’inverse de l’amour entre deux personnes. Je n’exigerai pas de mon ami que je sois son seul ami !
L’amitié est nécessairement réciproque à l’inverse de l’amour. Je peux bien être fou amoureux de quelqu’un ou quelqu’une sans recevoir la pareille !
L’amitié est étrangère à toute attirance érotique à l’inverse de l’amour qui ne saurait s’en passer !
Absence d’érotisme, absence de jalousie, une réciprocité parfaite du sentiment, voici la définition idéale de l’amitié !